Toutes les entreprises proposant des feux d’artifices ne se valent pas. Or leurs compétences sont essentielles pour obtenir un spectacle de qualité tant le métier d’artificier de divertissement ne se limite pas au feu d’artifices proprement dit.
L’artificier professionnel est un commercial qui démarche ses clients, un gestionnaire qui commande les artifices, un artiste qui crée le spectacle, un artisan qui le prépare, un industriel qui le stocke, un transporteur qui le livre et un tireur qui le met en œuvre. Le tout dans le respect des exigences réglementaires afin de protéger son client. L’opérateur tireur (appelé pompeusement artificier) dispose d’un certificat de qualification pour tirer et mettre en œuvre un feu d’artifices, rien d’autre.
Malheureusement, de nombreuses entreprises sur le marché s’exonèrent des contraintes réglementaires inhérentes au métier et abusent de la confiance des acheteurs publics en leur présentant une version enjolivée de la réalité, au risque de transformer ceux-ci en victime ou même co-accusé en cas de contrôle, ou pire, d’accident.
C’est pourquoi il faut se poser vingt questions pour assurer que le jour dit la fête sera réussie
Ai-je bien compris mon interlocuteur ?
Les devis, catalogues et propositions personnalisées de feux d’artifices sont difficiles à comprendre dans leur réalité à cause des termes techniques employés, qui tiennent plus du jargon que du langage courant. Le démarcheur doit vous informer de manière simple et concise dans un langage compréhensible sur l’ensemble de sa démarche. A l’inverse, la simplicité peut cacher une déformation de la réalité : un dépôt n’est pas forcement une ICPE et un camion n’est pas toujours un véhicule ADR.
N’hésitez pas à vous faire expliquer.
Comment regarder la présentation illustrée ?
Les effets pyrotechniques présentés ne sont pas toujours représentatifs de la réalité du spectacle proposé. De plus, les vidéos présentées ne correspondent pas forcement à ce que vous aurez en réalité. Voir un feu d’artifices en photos ou même en vidéo n’a pas le même impact que le voir en réalité. Un écran d’ordinateur n’est pas comparable à un ciel étoilé !
Demandez à garder les vidéos pour les comparer à votre spectacle, surprise garantie !
Les chiffres sont-t-ils réalistes ?
Les offres comportent le nombre de projectiles total et/ou ventilés par calibres, par séquences, par tableaux, etc. Elles comportent aussi le poids de matière active, c’est-à-dire l’explosif.Examinez ces chiffres avec soin et calculez les ratios suivants :
– poids moyen d’un projectile,
– prix moyen d’un projectile.
Les résultats sont souvent éclairants sur le sérieux de l’offre. Si vous constatez que le poids moyen correspond à quelques grammes et que le prix moyen n’est que de quelques euros, à l’évidence il y a quelque chose qui ne va pas.
Ces critères ne sont jamais pertinents car trop vagues.
L’offre est-elle vraiment attractive ?
Votre interlocuteur vous propose une offre décalée par rapport à la concurrence. Méfiez vous des remises mirifiques qui peuvent cacher un service bâclé, des produits bas de gamme ou simplement une tromperie sur la quantité.
De plus, un nombre important d’opérateurs sur le terrain n’est pas compatible avec un faible prix.
Voir « les chiffres sont ils réalistes »
Le calibre et la durée sont-ils si importants ?
Ces critères techniques ne sont pas pertinents car le calibre (par exemple 75 mm) n’est qu’une donnée et la durée dépend de la manière de tirer. Cela revient à regarder une bouteille de 75 cl sans goûter son contenu.
Il est préférable de s’intéresser à la qualité des artifices, qui sont à l’origine des effets et des couleurs, plutôt qu’à la quantité.
Faites vous décrire le spectacle en termes d’effets et de variété.
Les artifices sont-ils attrayants ?
Difficile pour un non initié de se faire une opinion sur les artifices en terme de couleur, intensité, originalité du spectacle proposé, mais c’est l’un des secrets de la qualité et la différence entre un beau feu d’artifices et un feu d’artifices médiocre.
Le deuxième secret est la maîtrise du tireur, mais vous ne le constaterez qu’au moment du spectacle.
Exigez un opérateur tireur exercé.
D’où proviennent les artifices ?
La provenance des artifices est un bon indicateur. Même si on trouve d’excellents produits en Asie, les produits européens sont largement supérieurs en termes d’intensité et de couleurs.
En général, les produits européens ont une enveloppe en plastique, entièrement ou partiellement, et le nom du fabricant apparaît sur l’étiquette collée obligatoirement sur chaque article. (un produit sans étiquette est un produit suspect interdit par principe).
Il n’y a plus de fabricant en France, à l’exception d’un tout petit, incapable de fournir à grande échelle. Il faut donc se méfier de celui qui propose des produits français.
Voir « les artifices sont ils attrayant »
Si je tire moi même mon feu ?
La livraison gratuite du feu et la fourniture du matériel nécessaire à sa mise en œuvre doit être précisée ainsi que la reprise de ce matériel après le spectacle.
Faites détailler la proposition avant de comparer.
Si je commande un feu « clés en mains » ?
Faites porter sur le contrat le coût des frais annexes supportés par l’acheteur de demandés par votre interlocuteur tels que la fourniture de matériel complémentaire (parpaings, lattes de bois, sable, brouette, abri, etc.) et/ou la restauration des opérateurs, leurs rafraîchissements et parfois même leur hébergement.
Tous ces faux frais ont un coût.
Faites détailler la proposition avant de comparer.
La marque est-elle un gage de qualité ?
Attention à ne pas se laisser aveugler par la marque.
Un nombre important de revendeurs ont le loisir d’utiliser le nom d’une marque connue même si les produits qu’ils utilisent viennent d’ailleurs pour la plupart.
Vérifiez l’origine des produits.
Mon feu est-il livré le jour même sur le lieu du tir ?
En ce cas c’est votre interlocuteur qui va stocker votre feu.
Demandez-lui de vous rassurer sur les conditions de stockage : un artifice entreposé dans de mauvaises conditions (chocs, humidité …) peut se révéler dangereux au moment de son utilisation, et devenir source d’accident.
Mon interlocuteur a-t-il d’une installation de stockage ?
Si oui, exigez qu’il vous présente la copie de sa propre autorisation préfectorale d’exploiter le dépôt dans lequel il stocke et prépare votre feu.
S’il ne dispose pas d’une ICPE, où stocke-t-il ses artifices ? Il est impensable de voir un boucher sans chambre froide.
– Au cas où il déclare une installation en dessous des seuils réglementaires, les seuils minima sont si bas qu’il ne peut pas stocker un gros feu. Encore moins plusieurs car vous n’êtes probablement pas son seul client.
– Au cas où il se dispense de stockage au prétexte que son propre fournisseur le livre le jour même sur le lieu de votre tir, n’oubliez pas que son livreur va probablement livrer plusieurs tireurs, dont le votre, sur plusieurs communes, au même moment. Comment fait-il ? Est-ce réaliste d’être livré par le fournisseur de votre interlocuteur, dont le dépôt se situe sans doute à plusieurs centaines de Km, et d’être en même temps le mieux disant ?
– Au cas où il tricherait en stockant illégalement, acceptez vous le risque qu’il se fasse prendre la veille ou le jour de votre spectacle, avec les conséquences attendues ?
Rassurez vous sur sa capacité ou celle de son fournisseur à livrer l’ensemble de leurs clients en même temps (on peut estimer à 15000 le nombre de feux tirés le 13 juillet au soir, or il n’existe qu’une dizaine de dépôts aux normes dans le nord de la France, capables de livrer
Mon interlocuteur assemble t-il lui-même mon feu ?
Exigez qu’il vous présente sa propre autorisation d’exploiter une installation classée à la rubrique 1310.
Il ne peut manipuler au sein d’une installation classée à la rubrique 1311 (stockage). Comment fait-il ?
Pour info, il doit nécessairement disposer d’une installation classée à la rubrique 1310.
Mon interlocuteur respecte t-il l’ADR ?
Un véhicule ADR n’est pas obligatoire pour les petites quantité de matières explosives mais on n’imagine pas un artisan taxi sans voiture. Un artificier sérieux dispose évidement d’un véhicule aux normes et s’assure les services d’un conseiller à la sécurité. Pour le professionnel, ce conseiller est obligatoire pour la seule livraison même s’il n’est ni le transporteur ni le stockeur.
Demandez-lui s’il dispose d’un conseiller à la sécurité.
Pour les feux importants, il faut exiger de votre interlocuteur les documents (carte grise, barré rouge, certificat de formation du conducteur au transport des explosifs) attestant qu’il est en conformité avec l’ADR.
Voir aussi « livraison sur le lieu du tir »
Mon interlocuteur est-il compétent ?
Depuis 2010, la réglementation impose la détention d’un certificat de qualification F4/T2 pour la manipulation et la mise en œuvre des articles pyrotechniques. Attention, ce certificat n’est pas un CAP.
Il existe deux niveaux de certificat :
– Le niveau 1 : L’artificier ne peut mettre en œuvre, entre autres, les bombes d’artifice d’un calibre supérieur à 100 mm et les artifices classés dans le groupe K4 de l’ancienne réglementation Française, abrogée en juillet 2017.
– Le niveau 2 : Le tir d’articles nautiques ou sur barge, de bombes de calibres supérieur à 100 mm ou de batteriesfortement éventaillées (>35°) est réservé au niveau 2.
N’hésitez pas à lui demander s’il connaît les décrets 2010-455 et 2010-580 qui gèrent l’activité pyrotechnique, qu’il est sensé maîtriser.
Le public est-il en sécurité ?
Dans la réglementation issue de 2010, ce n’est plus l’organisateur qui détermine les mesures liées à la sécurité du public, mais le responsable de la mise en œuvre (le tireur, votre fournisseur) qui détermine les meilleures distances de sécurité pour l’environnement humain et le voisinage.
C’est une révolution que n’est pas encore bien comprise par tous.
Les distances de sécurité doivent être déterminées à l’aide des éléments portés sur l’étiquette des produits de catégorie F4.
Assurez vous que vous êtes en présence d’un professionnel rigoureux qui saura vous exposer les mesures qu’il mettra en œuvre pour préserver le public et l’environnement.
Le plan de tir est-il réaliste ?
Le plan de tir remis avec la déclaration du feu doit intégrer les conditions particulières du lieu de tir, la prise en compte des dangers prévisibles et les mesures pour s’en protéger. C’est une étude de dangers.
L’expérience acquise par un organisme indépendant, membre du SPSD, dans la relecture des dossiers pyrotechniques remis à l’organisateur par le responsable de la mise en œuvre, démontre qu’ils sont souvent incomplets, erronés et irréalistes.
Imposez-vous leur lecture et leur compréhension.
Voir aussi « ai-je bien compris mon interlocuteur »
Suis-je protégé ?
Votre interlocuteur doit vous présenter une attestation de son assurance responsabilité civile.
Exigez que les montants des garanties soient indiqués clairement sur l’attestation d’assurance, souvent ces montants sont dérisoires et c’est la collectivité qui doit faire l’appoint en cas de problème.
Comme dans le BTP où la responsabilité des maires est engagée lorsque l’entreprise qu’ils emploient se trouve en infraction, n’oubliez pas que votre responsabilité pourrait être engagée au cas où votre fournisseur ne respecterait pas les réglementations relatives au travail, au stockage, au transport ou à la mise en œuvre.
Suis-je en présence d’un professionnel ?
Celui qui se déclare artisan Boucher est titulaire d’un CAP, dispose d’une chambre froide et d’un véhicule frigorifique, le tout aux normes, il veille à la satisfaction de son client sous le contrôle d’une administration contraignante en matière de santé publique. Encore faut il qu’il soit sérieux mais son engagement l’y contraint. Celui qui découpe la viande est un employé appelé garçon boucher.
Il en est de même pour l’Artificier, titulaire d’un certificat de qualification (à la mise en œuvre uniquement), qui dispose de capacités de stockage, de manipulation et de transport aux normes, qui veille à la satisfaction de son client sous le contrôle d’une administration contraignante en matière de sécurité de l’environnement. Encore faut il qu’il soit sérieux mais son engagement l’y contraint. Celui qui met en oeuvre le feu d’artifices est un opérateur tireur.
Si votre interlocuteur, qu’il soit boucher ou artificier, peut attester qu’il respecte l’ensemble de la réglementation sans évasion ni faux semblant : faites lui confiance.
Ai-je fait le bon choix ?
Le jour du tir, il est aisé de vérifier les compétences de votre fournisseur par quelques points faciles à observer, en partant du principe que le jour du tir vous ne comparerez jamais les produits livrés avec la liste prévue car ils sont déjà montés, emballés, préparés, etc.
– L’état du matériel doit être irréprochable, car du matériel fatigué, mal conçu, inapproprié est source de difficultés ou d’accident.
– Les pièces doivent être réparties avec logique et rigueur, l’installation solide.
– L’ambiance de travail doit être studieuse et non festive, pas d’alcool ni de cigarette sur le chantier (c’est une amende de 5eme classe).
– Les dispositions prévues sur le plan de tir ont pu être modifiées en raison d’une évolution des contraintes. Le tireur doit, en ce cas, pouvoir vous l’expliquer clairement. A l’inverse, si vous constatez une évolution des contraintes qui n’a pas été prise en compte, il faut s’inquiéter.
– L’emplacement du poste de tir doit permettre au tireur de surveiller le bon déroulement des séquences en veillant à la sécurité. Très éloigné, c’est suspect et dangereux.
Le déroulement du spectacle doit paraître harmonieux avec une progression constante entre l’annonce et le bouquet, voluptueux. Mais cet élément est directement lié à la pratique du tireur et ne vérifie pas les compétences de l’artificier : le feu d’artifices n’est que le dernier maillon de la chaine.